Gestion d'Image > Le Festival d'Arts > Europalia China > Bruxelles
La vision globale, un enjeu stratégique
Au départ, j’avais en tête de parler d’une ‘formidable exposition’ mais comment faire quand il y en a plusieurs en même temps pour rendre compte pendant plusieurs mois d’un véritable panorama de l’art chinois présenté en Europe. La démarche est tellement ambitieuse, étonnante et réussie qu’il me semble vraiment important d’en parler, de façon forcément trop succincte bien sûr mais d’en parler quand même. Le thème très actuel que je retiens est celui du management d’un projet global visant à mettre en scène l’image d’une Chine triomphante forte de sa légitimité passée pour encore mieux fonder l’avenir. On n’est pas actuellement le n° 2 mondial sans avoir des aspirations clairement affichées.
La stratégie du Temps
Le moment est forcément choisi avec soin. C’est un élément stratégique d’un projet de si grande ampleur. Il ne saurait donc être laissé au hasard. Le festival a eu lieu après la fermeture des Jeux olympiques et avant l’ouverture de l’Exposition universelle, de façon à capter l’attention sur une durée longue. Il ne s’agissait pas pour les responsables chinois de faire un coup médiatique mais de montrer la légitimité, la richesse, la diversité et l’amplitude des arts sélectionnées pour représenter dignement et avec fierté la Chine. Après l’organisation des Jeux olympiques, inscrits au cœur de notre héritage gréco-romain et avant l’Exposition universelle chère au cœur des Français qui citent toujours avec plaisir le Baron Coubertin « l’important est de participer ».
La durée du déroulement des différents évènements composant ce festival est impressionnante. Elle court sur 4 mois et 1 semaine, du 8 octobre 2009 au 14 février 2010. Cette dernière date n’a rien d’un hasard : c’est en effet le Nouvel An chinois fêté partout dans le monde par les Chinois de Chine et la Diaspora belge à Bruxelles. Au niveau symbolique et familial, c’est la fête la plus forte de l’année, un moment d’hommage aux disparus, un moment de rassemblement au sein de la famille, le moment où on prend plein de bonnes résolutions et mange de bonnes choses… A cette occasion, les Chinois de Chine se voient attribuer une semaine de vacances.
La durée s’entend également du temps de préparation du projet. A partir du moment où l’accord s’est fait entre les autorités chinoises et son partenaire européen belge, Europalia, il a fallu en effet deux ans pour mobiliser tous les acteurs afin de faire aboutir ce vaste panorama d’arts en Europe. Quant à la durée entre le moment où l’idée est devenue projet et le moment où il a été mis en route, nulle information n’a filtré. Gageons qu’il a fallu plusieurs années, surtout quand on connaît la capacité chinoise à voir loin et à savoir mettre en œuvre des stratégies complétées avec les tactiques appropriées en intégrant toutes les techniques les plus avancées du management de projet.
La stratégie des chiffres
Les 4 lignes de force ressemblent aux quatre points cardinaux qui structurent l’espace, le nord, le sud, l’est et l’ouest. Dans le monde de l’art, ces lignes de force aboutissent aux quatre thèmes sélectionnés suivants que sont la Chine éternelle, la Chine contemporaine, la Chine en couleurs et la Chine et le monde, avec toujours au centre de ce quadrilatère, la Chine, centre du monde.
L’ordre de la présentation est bien sûr important. Il faut l’assortir des connexions qui se nouent naturellement entre les items, avec au centre ce qui constitue l’essence même de la spiritualité chinoise, la permanence de la Chine entre intemporalité et changement.
En Chine, c’est le Ministère de la Culture de la République populaire de Chine qui a monté le projet avec un réseau étoffé d’experts répartis sur tout le territoire. Pour l’Europe, Europalia International a travaillé avec un comité de d’experts complété par plus de 210 partenaires culturels et 1 000 artistes.
1 101 175 visiteurs ont été enregistrés. Mais ce total n’inclut pas par exemple les plus de 100 000 voyageurs par jour attendant leur train à la gare de Bruxelles Midi dont le grand hall était orné de grands panneaux aux couleurs de la Chine. Une fois de plus, on comprend l’importance des grandes gares et des aéroports internationaux en matière de communication par voie d’affichage.
La stratégie d’image
C’est un jeu mental très utilisé de par le monde que d’évoquer la puissance passée pour renforcer son image d’aujourd’hui et fonder celle de demain. Parmi toutes les manifestations, et elles sont si nombreuses que je pourrais pas vous les citer, j’en ai choisi quatre dans l’abondante documentation publicitaire qui a fait connaître les évènements et attiré les visiteurs européens.
Elle est au cœur de la réalité d’aujourd’hui. Le centre du monde est maintenant en Asie et en Asie, en Chine. Elle se traduit par des immeubles à l’architecture très innovante, comme on peut le voir à Shanghai actuellement. Elle se traduit aussi par des projets tels que Superstar, a mobile Chinatown, qui a été présenté à la 11è Biennale de Venise, par l’architecte Ma Yansong/MAD. C’est une ville nouvelle, autonome en matière d’énergie, d’eau, de recyclage des déchets, de santé, de sports et qui dispose même d’un cimetière virtuel.
Elle vise la démarche d’un très grand artiste connu dans le monde entier qui est si chinois à nos yeux qu’il en atteint l’universalité. Il s’agit de Zao Wou Ki dont l’exposition à la Fondation Folon couvre plus de 50 ans d’encre de Chine et lavis d’encre ainsi que des aquarelles en couleur. Le nom de son exposition « Entre ciel et terre » montre bien sa volonté d’aller à la rencontre avec la Chine qu’il avait quitté à 28 ans pour se rendre à Paris.
Cette fois-ci, il s’agit d’une photo dont le titre explicite la volonté de l’artiste Chi Peng :
« Sprinting Forwards 2, 2004 ». Des hommes jeunes et nus vus de dos courent dans la rue. Ils croisent un autobus rouge qui vient en sens inverse, en s’engageant sous un pont, au milieu de petits avions rouges. Chi Peng a 28 ans. Il s’est photographié courant ainsi dans une rue qu’il qualifie de banal.
Elle est une des stars de l’exposition consacrée au Shanghai des années 1900-1949, la période où l’influence occidentale fut forte. On créa même de nouveaux mots tels que « modeng », un assemblage de ‘modern’ et de ‘mode’ appliqués « aux films, au café, au golf et aux soirées dansantes ». La publicité en particulier connut un essor considérable dans plusieurs domaines, la ville, l’agencement de la maison, le vêtement …
. Superstar, a mobile Chinatown, une création de Ma Yansong/MAD, à découvrir sur
http://www.archicentral.com/superstar-a-mobile-chinatown-by-mad-11887/
. Entre Ciel et Terre, Zao Wou Ki à la Fondation Folon*, La Hulpe, à 20 mn au sud de Bruxelles, dans le Parc Solway.
http://www.fondationfolon.be/index_news_detail_fr.php?date_excl=2009
. Sprinting Forwards 2, 2004, découvrez le dossier pédagogique qu’Europalia China a conçu sur l’œuvre de ce photographe à l’intention des enfants.
http://www.europalia.be/IMG/pdf/dossier_pedagogique_The_State_of_Things.pdf
. Shanghai Modern 1900-1949, au centre d’Art de Rouge Cloître à Bruxelles, à retrouver sur le site belge du lieu d’exposition et sur le site du NAMOC (National Art Museum of China)
http://www.rouge-cloitre.be/agenda/agenda_detail.php?id=30
http://www.namoc.org/news/gnxw/2009/200911/t20091104_118490.html
. Voir Bozart Magazine du Palais des Beaux Arts de Bruxelles, de novembre 2009, un magazine bourré d’informations sur la manifestation
http://www.bozar.be/activity.php?id=9356&lng=en
. Photos de plaquettes Europalia
* = Une info de dernière minute, la Fondation recherche des étudiants pour assurer l’accueil cet été, téléphonez en Belgique à Stéphanie Delmotte, 02 653 34 56