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Le Blog d'Elisabeth Poulain

P.52 WBW > Les Habits des Vins d'Expression > Le bouchon

, 12:16pm

Le bouchon est si directement relié au vin qu’il est plus important que la forme de la bouteille elle-même. Il est si fondamental qu’il ne saurait y avoir de grand vin sans bon bouchon ou de vieillissement en bouteille possible. C’est dire son importance. C’est le bouchon qui fait la bouteille au sens premier du terme, si non il faudrait parler de carafe. Il n’est pas une pièce de l’habillage mais un élément aussi important que le tonneau, son prédécesseur, dans le cycle du vin.

 

Les soucis qu’il cause aux vignerons sont à la mesure de l’importance qu’ils lui confèrent. Il leur faut déterminer la qualité du liège, sa composition, sa longueur… Pour s’en convaincre, le chiffre inscrit en mm sous la bouteille donne l’indication de la hauteur  entre le haut de la bouteille et le niveau du vin: plus le chiffre est élevé (70mm), plus le bouchon sera long de façon à assurer une meilleure protection au vin et, en principe, meilleur doit être le vin. Car nul ne prendrait le soin de sélectionner un bouchon coûteux pour un vin sans attrait qui ne présente aucune capacité de garde. Les bouteilles à haut col donnent une image de qualité, à vérifier bien évidemment lors de la dégustation. C’est en particulier le choix de :

- Jacky Blot du Domaine de la Taille aux Loups pour ses Montlouis,

- Eddy Oosterlynck du Domaine de Juchepie pour ses Coteaux du Layon-Faye d’Anjou… 

                         

L’attachement au bouchon.

On garde les bons bouchons ; on les emporte en quittant le restaurant ; on les palpe pour ce toucher comparable à la peau, si vivant, doux et dense à la fois. Le liège est inimitable, surtout en France, le pays qui aime déboucher une bouteille avec un tire-bouchon. Le bouchon devient un media de communication. On y porte feuilles de vigne et grappes, son nom, celui du domaine, le portail entrouvert du château, le château, son emblème graphique, son numéro de téléphone ou des dessins. Traditionnellement c’est la mention ‘Mise en bouteille à la propriété’ ou ‘au château’ qui est portée dessus avec des variantes comme ‘au domaine, dans nos caves, aux chais ou dans la région de production’. Quelques exemples :

 

- Frédéric Brochet d’Ampelidae porte une grande attention à l’habillage de la bouteille et n’oublie pas le bouchon sur lequel il fait figurer le nom du domaine un dessin du château de Marigny-Brizay France, ou une guirlande joyeuse avec petits bonhommes et petites bonnes femmes sous des grappes plus grosses qu’eux sous le commentaire « vendangé dans la bonne humeur ».

 

- Bénédicte de Rycke signe ses bouchons de vins de Jasnières et de Coteaux du Loir, indique le millésime et précise que la mise en bouteille se fait à la propriété. Le tout encadré comme un message écrit sur le bouchon couché.

 

- Olivier Cousin précise le type de vin, Anjou, indique son nom et son numéro de téléphone dans un encadré aux coins inversés sur une face. L’autre face de ce bouchon qui se tient droit, c’est un des rares exemples de ce type, est occupé par son emblème graphique, un gentil monstre mi-Neptune, mi-Bacchus qui s’accroche à une ancre.

 

- Mark Angeli indique sur un bouchon long le millésime, le nom de son domaine –un terme qu’il récuse - la Ferme de la Sansonnière, le nom la parcelle d’où provient le vin, Les Gélinettes, avec pour illuminer le tout, son emblème, une licorne en blason. On comprend aussi pourquoi le bouchon est si haut

 

L’évolution actuelle

Elle se fait dans deux directions, par la matière synthétique utilisée pour le bouchon ou par la capsule à vis.

 

Le bouchon synthétique a ses partisans en particulier pour des vins prêts à boire et dont la contenance de la bouteille est adaptée à la consommation des participants. Difficile souvent de remettre le bouchon sur la bouteille entamée et non vidée. Son principal avantage est la sécurité qu’il offre. Il est sans mauvaise surprise. Un de ses inconvénients est son aspect lisse, inerte et sans mystère qui oblige à vitaliser sa surface en faisant figurer des mentions dessus ou en utilisant la couleur : noire, ivoire, rose, orange… Les bouchons de couleur forte en particulier connaissent un succès étonnant  pour le lancement des rosés.

- Wilfrid Rousse, qui a par ailleurs une belle collection de bouchons de bonnes bouteilles bues, s’est vu dévalisé pour son Rosé de Saignée à l’étiquette aux allures d’explosion de vie et au bouchon violet assorti.

 

Pour la capsule à vis, le pas a été sauté dans les années 1970 en Australie et en Suisse. En Loire, la situation reste peu ou prou figée, tant les habitudes sont tenaces. Mais il est des innovateurs convaincus.

- Florent Baumard a pris cette décision pour tous les vins du Domaine, au regard des essais très concluants faits au bout de 25 ans entre des vins identiques.

 

- David Levin et Thierry Merlet du Domaine Levin ont doté le Loire Sauvignon Blanc Levin, essentiellement orienté vers les marchés anglo-saxons, d’une capsule de qualité pour leur bourguignonne feuilles mortes à étiquette noire avec des mentions argent à chaud.

 

La troisième voie

C’est celle qui est choisie par Philippe Gilbert avec une bourguignonne dotée d’un bouchon de verre pour un Menetou-Salon 2007. Le bouchon de verre connaît une belle percée en Allemagne, en Autriche et en Alsace. C’est une belle réussite au plan technique : chaque bouchon est dotée d’une bague plastique qui assure l’étanchéité entre les deux parois de verre.  

 

Le jeu                                                         

La bouteille peut n’avoir enfin ni bouchon ni capsule à vis et pourtant contenir du vin. Elle a en ce cas un bouchon de porcelaine fixé à une bouteille de type limonade.

 

916. Son nom, Fildefer avec un x sur le ‘e’ parce qu’il y a une faute évidemment volontaire. C’est un Muscadet Sèvre et Maine sur lie de Sauvion.

 

Pour suivre le chemin

. Lire le plaidoyer de Florent Baumard en faveur du bouchage à vis sur http://www.baumard.fr/

Il explique avec beaucoup de passion et de persuasion  que le choix du bouchon à vis n’est certainement pas un compromis, mais l’assurance de la qualité. Au regard de l’attente des amateurs de vin et des distributeurs, il n’est plus possible à un vigneron de décevoir et de jouer sa renommée ainsi au jeu du hasard du goût de bouchon. Le bouchon à vis est aussi plus respectueux du développement durable.

. Philippe Gilbert a présenté ce vin en bouteille bourguignonne et bouchon de verre au Salon des Vins de Loire 2008. C’est un test qu’il a fait pour une série de 3 500 bouteilles. Dans une interview à Ouest-France, le vigneron, qui a converti son domaine à la biodynamie, explique que l’utilisation du bouchon de verre modifie la nature même de la bouteille qui « devient une carafe. On la débouche comme un flacon de parfum. C’est un autre charme plus féminin ». 

www.domainephilippegilbert.fr

. Prochain billet sur les partenaires de la bouteille.

. Photos EP