MOG, Collection F. Poulain, Portrait n°2-extrait, Les yeux, Cl. Elisabeth Poulain
Il faut que je vous prévienne. Vous allez avoir un choc car ce sont vraiment des portraits, dont on peut dire, sans exagération, qu’ils sont franchement bizarres. Le peintre visiblement a aussi choisi ce nom curieux de « MOG » pour se désigner lui. Est-ce un acronyme, pour désigner « Maurice, Oscar, Gaston », ou bien « Michel, Olivier, Guillaume » ? Et pourquoi MOG serait-il forcément un « homme ? » Pour MOG au féminin, je pense à « Michelle, Odette, Germaine » ou, pour changer, « Mary-Lou, Olga, Gabrielle ». D’autres choix sont évidemment possibles. A chacune, à chacun de jouer à ce jeu de devinette. Ou bien y-a-t-il un autre mystère que nous ne connaîtrons jamais, ces tableaux ayant été acquis au début du IIIe millénaire en raison justement de leur forte singularité.
MOG, Collection F. Poulain, Portrait n°1, Cl. Elisabeth Poulain
Je commence par le plus petit (32cm de longueur x 17,2cm de largeur) qui est aussi le plus « facile à décrypter ». C’est le plus épuré - une façon de parler - qui signifie qu’il y a peu de figures géométriques surajoutées au dessin de fond. MOG visiblement a horreur du vide. Une des conséquences est que le motif peint- le ressort de la peinture - est plus compréhensible. Ce n’est pas pour autant qu’on peut parler de « remplissage » du fait que les motifs sont composés de lignes qui forment des enclos enrichis de couleurs à formes géométriques inachevées, toujours avec des traits multiples, des points à l’intérieur. Une certitude, MOG n’est pas un peintre simple, pour autant aimer la complexité des lignes, la superposition; une autre raison est qu’il adore la couleur, surtout quand celles qu’il a choisies se mélangent à d’autres.
En partant du haut, vous êtes sûr de bien rencontrer le regard d’un drôle de « zigoto », dont la « tronche » a de quoi vous inquiéter. Il est vrai que tout est bizarre dans ses portraits, mais sans rien d’inquiétant. « Bizarre, vous avez dit bizarre, comme c’est bizarre !». Commençons par le haut du plus lisible de ses compositions, le plus petit carton cloué sur des baguettes de bois, de section carrée d’1,2 cm.
- Ce sont les yeux qui vous attirent et là aussitôt le trouble commence, si vous regardez les deux en même temps. L’œil de gauche – celui qui est à gauche à votre vue - ressemble à une bille rouge, l’autre est bleue. Aucun n’est semblable à l’autre. Le fond de l’œil de gauche est vert cerclé de noir, lui-même doublé d’un trait rose qui se détache sur le fond orange. L’autre œil, que je qualifierai « de droite » - à gauche pour le zigoto – est bleu sur fond rose-violet avec un trait rouge qui double à l’intérieur le demi-cercle noir qui constitue l’œil.
. Le nez maintenant. Vous descendez d’un étage et c’est là que le trouble commence vraiment. A bien regarder la composition, l’idée vous vient de suivre le trait noir en partant de la gauche vers la droite dans la partie haute. Et là, vous vous rendez compte qu’il y a une continuité étonnante dans le trait, pas à 100% bien sûr, quitte parfois à devoir reprendre le même chemin en arrière pour prendre un autre tracé noir à certains embranchements. Visiblement « MOG a horreur du vide ». Je répète « MOG a horreur… » et tout autant de la symétrie.
MOG, Collection F. Poulain, Portrait n°2, Cl. Elisabeth Poulain
Voici pour renforcer cette première approche, MOG numéro 2. Comme j’ai ce tableau sous les yeux, je peux vous dire qu’il a été acheté en octobre 2005, vraisemblablement par la propriétaire du trio. Ce n°2 est d’abord plus grand par ses dimensions. MOG devait se sentir à l’étroit et ne pouvait donner toute sa puissance de créativité. Ses dimensions 32cm sur 24cm - pas de MOG - du tableau !.
Comme la première fois, ce sont les yeux qui vont vous vous faire rentrer dans le carton. La pupille rouge est aussi à gauche et la verte est donc forcément à droite. Cette fois-ci, les deux yeux encore ne sont pas traités de la même façon.
. La pupille rouge à gauche est entourée d'un cercle noir et puis d'un second cercle blanc; elle touche par ailleurs un demi-cercle rose en position inversée par rapport au N°1 lui-même doublé d'un demi-cercle rouge. L'espace entre les deux est rempli de rayons rouges: 4 à gauche et 3 à droite qui joignent le petit cercle et le demi-grand cercle rouge.
.La pupille verte à droite est cerclée par un trait rouge-verdi, puis par du noir, du rose et un trait jaune pâle qui se voit à peine. Il ne masque pas les 7 rayons noirs qui relient la pupille ronde et un cercle noir inachevé. En dessous le fond du carton est rouge, sur lequel se détache bien un grand cercle qui entoure cet œil de droite et qui est lui-même entouré d’une forme arrondie dont le tracé est rose.
Et c’est là où le trouble commence vraiment, à l’exception de la signature de MOG bien visible, écrit cette fois-ci verticalement sur le côté gauche. Quant au reste, la seule certitude que je puisse avoir est que MOG adore le mystère. Comme en attestent, les traits de cette partie médiane qui se terminent à double angle droit sur la gauche avec toujours des traits partout, mais d’un seul côté. Une seule fois, en partie gauche en bas, des traits verts enrichis d’un trait noir en leur milieu se « parlent » mais jamais en se touchant. Entre eux, sur un fond orange, des traits jaunes pales arrivent à trouver leur place. Pour les couleurs, citons ex aequo, le rouge, le jaune, le vert et le noir, le rose n’arrivant que loin derrière.
MOG, Collection F.Poulain, Portrait n°3, Cl. Elisabeth Poulain
Voyons enfin pour terminer, le N°3. Cette fois-ci, il s’agit d’une toile et non plus d’un carton. Outre la complexité des lignes et des formes, il y a là encore une explosion de couleurs. C’est une sorte de « portrait » plus grand par ses dimensions (40cm sur 40), avec un autre style de complexité, sans en être vraiment sûre. Disons, sans se tromper, que MOG a conservé des éléments des autres créations et choisi de mettre une nouvelle forme en valeur. Le brouillage en devient plus complexe.
MOG ne va pas cacher son nom au milieu à gauche en vertical (N°2) ou tout en bas à droite (N°1). Il a inscrit son nom toujours en majuscules en lettres plus claires argentées sur un fond bleu marine. Il figure dans une forme rectangulaire « à la mog », c’est-à-dire qu’aucun des côtés n’est parallèle à celui d’en face ; un seul des côté est parallèle au bord. Les trois autres s’amusent : celui du haut fait un décroché au milieu d’un bon centimètre vers le bord; le côté qui se trouve au milieu ne connait pas la ligne droite et penche en oblique vers le bord extérieur droit. Quant au quatrième côté, il « s’envole en arrondi descendant » vers le bord du tableau et là, il rencontre un bleu plus clair que ceux qui se trouvent déjà présents. Je vise plus particulièrement la pupille bleue d’un petit œil rond sur fond vert dans une forme étirée et arrondie pour la partie basse, couvert d’une forme identique sur le dessus mais rouge cette fois-ci. On va retrouver ce rouge dans quatre billes cerclées de noir en dessous, un autre bleu pour faire ressortir le vert du fond d’œil. Ce vert acide clair va être très présent dans la partie haute du tableau.
L’autre œil, celui de gauche, est à la fois plus franc et pas forcément simple, ou "simple à la façon de Mog". Une grosse pupille rouge ressort dans un fond d’œil orange, enrichi de deux formes en croissant d’un orange plus foncé. Le haut d’un bordé de quatre triangles rouges bordés de noir sur fond …vert avec une ligne arrondie bleu marine avec en plus de l’orange foncée. Le vert du bas de l’œil est doté également de cette teinte verte rafraîchissante, avec en plus un trait arrondi d’un vert moyen plus doux.
Arrive maintenant une forme nouvelle qui se décline par deux fois. On dirait un pied doté d’une forme arrondie sur le dessus et itou pour le talon. C’est d’ailleurs le même rouge qui est utilisé toujours d’une façon diluée d’ailleurs. Cette forme de drôle de pied va être reprise pour toute la partie basse du tableau. Avec une succession de couleurs étonnante : rouge entouré de vert clair, avec un vert plus foncé, allant jusqu’au noir, qui ressortent sur un fond jeune d’or orange, le tout étant enserré d’une ligne bleu noire.
En dessous arrive une grosse galoche, aux allures d’un grand sabot qui occupe toute la partie basse du tableau, avec ces quatre points verts, en dessous ces rectangles de couleur orange sur un fond composite qui mêle du bleu éteint, du vert foncé et tout autour du rose fuchsia, du bleu teinté de violet. Et comme il restait de la place à droite, MOG a placé une sorte de rectangle bleue entourée de lignes rouge-rose et orange. A gauche, on retrouve un thème cher à l’artiste, quand il a un creux, les triangles bleus entourés de rose et de noir dans une bande orange, qui garde des espaces blancs. C’est la première fois dans cette série de trois, que nous apercevons du blanc…
Et je ne peux pas vous en dire plus, que les trois œuvres que j’ai sous les yeux… A part la date de l'achat du N°2, je ne sais rien du peintre ni de ses motivations, rien...Je tiens, pour finir, à remercier la personne qui m'a prêté ces peintures, qui lui appartiennent, le temps de faire ce billet!
MOG, Collection F.Poulain, Portraits n°1, 2 & 3, Cl. Elisabeth Poulain