P.38 WBW > Les Habits des Vins d'Emotion > Le style de la graphie
Le panachage des typographies
Actuellement, la pratique courante consiste à panacher des écritures de façon subtile pour arriver à ajuster l’image projetée du vin à l’image du vigneron, quel qu’en soit l’ordre. L’objectif est de se distinguer de la concurrence souvent par l’exagération de la hampe ou du jambage d’une lettre afin de donner une impression élégante de mouvement. Comme celui de la plume d’autruche d’un mousquetaire qui ôte son couvre-chef devant sa dame de cœur.
- Pour Frédéric Brochet, les lettres anglaises permettent de jouer à la fois sur un format d’étiquette très particulier, un papier épais, une encre noire-bleue, des caractères qui jouent la modernité tout en étant écrits en lettres penchées avec un jeu sur la majuscule du A d’Ampelidae, Le S, dénommé Vin contemporain.
- Pour son Muscadet Sèvre et Maine sur lie, Nelly Marzelleau-Couprie structure son étiquette autour de l’appellation en caractères droits avec mise en valeur en caractères inclinés du nom du domaine Les Grands Presbytères, du millésime, de Vieilles Vignes et de la mise en bouteille à la propriété, les quatre informations les plus qualitatives.
- Claude Branger associe son nom et ses initiales à celui de son Muscadet Sèvre et Maine sur lie en lettres inclinées.
Une autre façon de faire est d’adopter son propre style d’écriture manuscrite, légèrement penchée, sans ostentation, de façon à avoir le meilleur des deux situations, la douceur de la main et la lisibilité des caractères droits.
- Pour son Saumur-Champigny ‘La Combe aux Fées’, Carnets de croquis, Lena Filliatreau accompagne les croquis de la combe et de la Loire d’une écriture que l’on dirait sortie d’un vrai carnet de dessin.
Une façon de communiquer consiste à jouer sur les majuscules ou terminales de mots de façon à créer un effet graphique d’appel d’attention, qui se joue trois lettres le plus souvent, ou quatre
plus rarement, pour donner de l’assise.
748. Une façon nouvelle consiste à mélanger la taille des caractères, en les déplaçant vers le bas pour donner l’idée de mouvement. C’est ce qu’a fait le Domaine de la Paleine pour un Saumur LA PALEINE en abaissant d’un cran le premier A ainsi que le E final et le second A de deux crans.
- le Menetou-Salon de la Busardière de J. van Remoortere pour le M, le S en majuscule et le n en minuscule,
- La Dame de Châtenoy du Domaine éponyme pour un Menetou-Salon s’écrit en petit mais avec des majuscules à grands jambages pour le L, le D et le C,
- Cuvée Majorum, un Pouilly-Fumé, de Michel Redde, La Moynerie, porte des jambages à volutes impressionnantes pour les majuscules C et M et aussi pour la terminaison ‘e’ de cuvée et une finition pour le ‘m’ de majorum.
La droiture des lettres romaines leur confère de la force et de la simplicité à l’information qu’elles véhiculent. Elles sont une marque de confiance en soi. Les majuscules sont simples. Ces lettres peuvent être difficiles à porter. Il faut donc que le vin et/ou le vigneron s’y prêtent. Ce sont les caractères internationaux par essence qui se marient bien avec la rigueur du style classique ou la volonté de s’exprimer. L’usage exclusif se développe en recherche d’un nouveau mode de communication plus directe. Dans le clan des partisans des les lettres droites :
749. Florence Veilex et Eric Yung de La Chapinière de Châteauvieux pour leur Touraine, le Clos du Clos, Côt, Châteauvieux,
- Michel Gendrier pour un Cour-Cheverny Cuvée François Ier Vieilles Vignes,
- Philippe Tessier pour son Cheverny ‘Coganis’,
- Vincent Pinard, Bué, pour ses Sancerre et en particulier ‘Nuance’.
Cependant, il y a quasiment toujours une mention ou une lettre en lettres manuscrites, pour faire ressortir le nom de la parcelle, du domaine ou de l’appellation.
- Le Saumur ‘La Roche aux Loups’ des Vignobles Louis Luneau ne comporte que le nom du domaine ou de la parcelle en lettres quasi manuscrites mais non penchées.
- Au Domaine des Matines, Le Saumur, Le Clos Riel, sélectionne les caractères manuscrits pour Saumur et les romains pour le Clos comme tout le reste de l’étiquette.
Les lettres originales donnent un ton d’intimité avec la personne du vigneron comme si celui-ci avait dédicacé son œuvre. Elles marquent aussi la volonté du vigneron qui incarne ses vins de montrer sa différence que l’on veuille rester dans un grand classicisme, s’ancrer dans notre époque ou être soi tout simplement.
- Clos Baudoin, un Vouvray de François Chidaine, attire l’attention sur l’appellation avec un travail graphique sur le ‘V’ et l’ ‘y’ et le Clos par rapport au nom du vigneron, placé ici au bas de l’étiquette pour renforcer l’assise, comme il est placé en haut pour son Clos du Breuil, Montlouis pour donner de l’impulsion.
- ‘Première Vendange’ est signé de la main d’Henry Marionnet qui marque la force des majuscules P et V tracées à la main, en signe d’affirmation de soi.
- Roc de Châteauvieux, Pinot noir ou Sauvignon blanc de Pierre Chainier, fait ressortir un R(air) de Roc(k) avec un ombrage léger de façon à donner plus de puissance à la lettre qui structure l’étiquette en vertical en se superposant au nom du village de Châteauvieux.
Un message de rondeur
C’est ce que font certains vignerons allergiques aux angles et au pointu :
750. Antoine Foucault choisit les lettres anglaises pour toutes les mentions de son Saumur Blanc, Domaine du Collier.
- Catherine Roussel et Didier Barouillet du Clos Roche Blanche jouent la rondeur de majuscules qui s’enroulent sur elles-mêmes pour leurs vins de Touraine.
751. Gitton Père et Fils,
pour le Sancerre Galinot,
adoptent une graphie droite en rondeur, qui confère une grande lisibilité, avec une toute petite fantaisie sur le S et des coins arrondis pour l’étiquette rectangulaire.
Et pour finir, seul un seul vigneron a créé une graphie originale pour un vin bien
particulier.
752. Il s’agit de Jean Baumard pour Vert de l’Or, un vin de table issu du cépage Verdehlo originaire de Madère, qui a réalisé peinture et graphie (voir étiquette
ci-dessus).
. Faire la transition du Signe du Trait ( chapitre 7) vers le Signe du Je-u ( chapitre 8)
. Savoir que le Signe du Trait est le partenaire naturel du Signe de la Couleur. Ce qui ressort, c’est son emploi à titre premier et sa grande capacité à s’appliquer aux Signes classiques et fondamentaux que nous avons déjà découverts. Le Trait et la Couleur sont ce qu’on leur fait dire avec une grande souplesse d’utilisation. Le design graphique n’en est réellement qu’à ses débuts en Loire, toujours très sensible à l’histoire et au château. La culture est encore fortement centrée les lettres anglaises, qui sont toujours de bons marqueurs d’élégance, et sur le sens des mots. Ces mots que nous allons retrouver dans le SIGNE du Je-u avec lesquels on joue beaucoup sur les bouteilles de vin.
. Retrouver toutes les étiquette du SIGNE du Trait dans l’album-photos sous le titre 7Labels.