Déjeuner à Bordeaux à l'Hôtel de Rohan, avec des Viallat aux murs
Disons-le d’emblée. L’Hôtel de Rohan n’est pas un endroit où l’on choisit de s’arrêter pour reprendre des forces après un long voyage en car le matin, avant une après-midi sportive de marche à pied, un mode de locomotion qualifié de doux par les penseurs du développement durable. Non, pas du tout. L’Hôtel de Rohan est un lieu si prestigieux, si emblématique d’un certain art de vivre à la française tel qu’on l’imaginait au XVIIIè siècle, que jamais je n’aurais pu imaginer y déjeuner un jour.
Quelques mots pour vous situer le décor. L’Hôtel de Rohan a été édifié de 1771 à 1784 à la demande de Ferdinand Maximilien Meriadeck de Rohan, archevêque de Bordeaux. La cathédrale Saint-André est d’ailleurs toute proche. A la Révolution, le palais passa aux mains des politiques et devient l’hôtel du département, puis de la préfecture, après avoir été un court instant siège du tribunal révolutionnaire. Puis il devint « palais impérial de Napoléon Ier en 1808 et château royal en 1815 sous Louis XVIII ». La ville de Bordeaux réussit après de longues négociations à l’acquérir en 1835 ; depuis l’Hôtel de Rohan est aussi l’Hôtel de Ville de Bordeaux.
Il est utile de vous préciser que ce n’est pas la salle à manger officielle. Celle qui nous a été attribué est située à droite du hall de l’entrée par les jardins. Elle l’a été au moins ce jour là le temps de ce repas qui nous a été offert par la Ville de Bordeaux. Réunis autour de grandes tables rondes, nous avions à notre disposition un buffet froid ; le temps nous était compté pour arriver à tenir le planning de la journée.
Il a été d’une très grande amabilité, empreint de simplicité et de finesse. J’ai beaucoup apprécié la grande gentillesse de ces messieurs en charge de l’accueil de notre groupe. L’un d’entre eux m’a ainsi montré les Viallat, dont les toiles étaient pendues aux murs de la salle, du hall et du grand escalier.
On le connaît plus sous son nom, que muni de son prénom. On dit « Ah oui, c’est un Viallat », « avec deux l » comme me l’a précisé mon guide d’un court instant, avant qu’il ne reparte appelé par ses fonctions réceptives. L’artiste, qui dit de lui qu’il conçoit « une forme organique aux signifiés indéniablement anthropomorphiques », est bien connu à Bordeaux et depuis longtemps.
En 1980, par exemple, il organisait une grande présentation de ses « Supports/Surfaces … sur des supports de toile libre ». C’est donc ainsi que ses toiles vivent sur les murs, comme aimantées par ces parois verticales, d’une façon magique, sans cadre, ni clou, ni ficelle visible. Elles en acquièrent une réelle dimension symbolique, d’autant plus forte qu’elles sont placées au milieu de panneaux de couleur chair dorée avec de lambris de style Louis XVI peints en blanc mat encadrés de bordures dorées. Un délicieux double degré revendiqué avec panache, dans une ville, vieille de 2 fois 1000 ans, comme nous l’a rappelé Michel Duchêne, l’élu en charge de l’urbanisme peu après.
C’est difficile de parler de simplicité dans un tel cadre, avec très présente une histoire où on parle d’une des plus grandes famille de la noblesse de France, d’empereur, de roi … la demeure d’un maire qui a été Premier Ministre de la France. Il n’en reste pas moins que deux faits demeurent (pardon, je ne résiste pas à la redondance) : il s’agissait d’un déjeuner de travail, non d’un festin aux frais du contribuable bordelais. Le menu a été bon et simple avec un assortiment de charcuterie, de taboulé, une salade de pâtes pour ceux qui voulaient changer. Ont suivi ensuite du rôti de beouf en sauce avec des carootes et des pieds de cèpes avec une ponte d'ail et pas moins de trois desserts : framboises parfumées au basilic, tiramisu et tarte aux fruits. En accompagnement, de l’eau bien sûr, un second vin du Château Castera, un Medoc 2005 que mes voisins et moi avons savouré avec beaucoup de plaisir et un Sauvignon pour ceux qui désiraient du vin blanc. Le café bu, nous sommes tous partis comme des flèches dans la salle de travail pour écouter et interroger deux des grands acteurs de l’opération de re-centrage urbain.
Thierry Guichard était encore Directeur général adjoint des services de la ville le samedi 29 mai 2010 et Michel Duchêne est toujours l’élu en charge de l’urbanisme. Si je cite le nom de T. Guichard en premier, c’est parce qu’il a effectivement commencé par nous resituer le cadre général du projet, les principes, les objectifs, les interrogations et la concertation mise en oeuvre.
Michel Duchêne, arrivé ensuite, a, quant à lui, plus tracé les enjeux politiques (de polis = la ville), humains et financiers (115 mE) de cette opération majeure. J’y reviendrai dans un billet ultérieur.
Pour suivre le chemin
. Sur le Palais, voir http://fr.wikipedia.org/wiki/Palais_Rohan
. Sur Viallat, voir son site officiel http://www.claudeviallat.com/pages/accueil.html
. A lire, si ce n’est fait, les deux premiers articles portant sur cette opération de reconquête des berges d’un fleuve parus sur ce blog.
. Attendre la suite
. Avec des photos de l’album-photos consacré aux Rives de Villes
. Photos EP, n°1 l'Hôtel de Ville vu du car , n° 2 le buffet, n°3 les desserts, n°4 un des Viallat, n° 5 les deux dames stars de la journée Maryvonne Fleury-Lourson, l'organisatrice de la journée, et Anne Gaëlle Deumié en charge de la communication sur le tramway d'Angers, n° 6 le groupe avant les interventions, n° 7 le grand Viallat dans la cage de l'escalier monumental, le seul "Viallat" qui a reçu un apprêt rigide de façon à garder sa forme.