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Le Blog d'Elisabeth Poulain

Stratégie d'export de vins > Le jeu du jonglage avec l'information

15 Septembre 2009, 10:30am

Publié par Elisabeth Poulain

Un jeu de stratégie très formateur.

Je me place, par exemple, dans le cas d’un petit domaine de vins de Loire qui veut développer ses ventes à l’exportation à la suite de la baisse de ses vins sur le marché français. Par exemple, parce qu’on pourrait prendre tout autre produit, une autre région et d’autres informations.

 

Sur un blog spécialisé et qui traite d’informations en provenance du monde entier, vous sélectionnez une information et vous commencez à jouer avec elle. Vous essayez de voir ce qu’elle vous apporte. Pour être sûre de ne pas faire du gloubi-boulga avec une information  trop fraîche, j’ai sélectionné Wine Alley du 11 août 2009. C’est suffisamment proche pour être toujours exploitable et pas trop lointain pour ne plus l’être.

 

Les titres de Wine Alley dans cet ordre.   

 

France

F1. Avis d’Expert : pour ne plus confondre fête des vins et foire de Gaillac

F2. Restauration : la TVA à 5,5%

F3. Santé : l’INCA et le Haut Conseil de la Santé publique

 

International

I1. Conjoncture : replis des ventes en vrac sur les vins de table et vins de pays

I2. Avis d’Expert : le marché du vrac entre valorisation et concurrence internationale

I3. Avis d’Expert : Nouvelle-Zélande, la fin d’une irrésistible ascension ?

I4. Interview du Pr Jean Dubois : « Le Marché Vinicole de l’Union européenne sera vraisemblablement à l’équilibre pour la campagne 2008-2009 ».

 

Marketing et Commerce

M1. Avis d’Expert : plus de la moitié du vin consommé en Suède sort d’un bag-in-box. 

M2. Tendance : le succès du blanc profite au Pinot Grigio au Royaume-Uni

M3. Les cavistes bretons enregistrent de lourdes pertes auprès de leurs clients britanniques

 

Informations et questions

Je sélectionne six informations pour la démonstration, pour alléger la démonstration. Et, voyez comme c’est joli, je me pose six questions.

 

1. Quelle impression est-ce que je ressens ? L’important  

2. Par où commencer ? Le déroulement

3. Que m’apportent ces infos ? La sélection

4. Qu’est-ce que je peux en faire ? La remise en ordre

5. Comment jongler avec l’info ? Mes éléments stratégiques

6. Comment jouer ? Le bonus

 

1. L’impression dominante

Il n’y a rien de bien nouveau mais quand même, peut être une ou deux infos à glaner. Je cherche ce qui va déclencher mon appétence à l’info.

 

2. Le déroulement de l’info

C’est important, car cette phase est ma porte d’entrée dans le monde de l’information. Le vrac semble le sujet le plus important. Travaillant dans le vin, je sais déjà que ce n’est pas là que je vais trouver de la valeur ajoutée, ce que me confirmera le second article I2.

 

Les 3 Infos

Mais en I1,  je trouve confirmation de 2 infos intéressantes sur les vins de pays.

 

= en rouge et rosé, les ventes de VDP sont quasiment stables entre 2003/4 et 2008/9,

= en blanc, la progression est certes légère mais les ventes progressent.

? par contre, je n’ai aucune info particulière sur l’international malgré le titre.

 

I2 consacré au prix de vente du vente et à la concurrence néo-zélandaise (connexion avec I3) me rappelle la dureté de la concurrence aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Les prix de nos vins français, qui ont bien augmenté en Loire ces dernières années, ne sont pas concurrentiels face aux importations chiliennes et argentines, sans parler des autres Européens dont on ne parle pas.

 

Et en plus un négociant importateur anglais conseille au gouvernement français de donner une aide commerciale et marketing à sa filière vins à l’extérieur de ses frontières, ce qui est interdit par l’UE pour cause de concurrence déloyale. C’est une façon espiègle de nous dire que nous ne  sommes pas bons nous les Frenchies, moi en Ier puisque je ne peux pas dire que je sois un exportateur.  Autant le dire, ça m’agace un peu beaucoup. On disait ça déjà à mon père ; 60 ans qu’on nous serine qu’on doit progresser, du genre « peut mieux faire sur mon bulletin de notes ». Ce qui est d’ailleurs vrai, la preuve, je suis devenu vigneron.        

   

I3 arrive à point nommé pour me soulager quant à la pression concurrentielle de la Nouvelle Zélande. Ce serait déjà ça. Et Prof Jean Dubois en I4 me conforte dans ma vision pas si pessimiste que ça. C’est trop long pour que je le lise tout mais si prof le dit, c’est que la situation n’est pas si mauvaise que ça.

 

= A lire les informations de l’International, je m’aperçois qu’il y a un savant équilibre dans Wine Alley pour ne pas trop me démoraliser. Je me rappelle aussi que l’Europe, c’est (en principe) chez moi, tout autant que la France et que l’International ne commence qu’avec les pays tiers. C’est pas pour autant que je vais trouver des infos sur mes concurrents italiens (sauf pour le Pinot), espagnols ou allemands dans la rubrique France. Mais bon passons.

 

Les 3 M

Ils me font danser la java, après cette euphorie de courte durée grâce à ce Jean Dubois, au nom qui sent si bon la France qu’on le dirait fait pour.

 

M1 me parle du succès du BIB en Suède (+ de 50%) mais ça je le savais déjà. La consommation ne fait qu’augmenter ; le marché est très concurrentiel et je ne m’y connais pas pour traiter avec un monopole d’Etat. 

 

M2, Le Pinot Grigrio, un pinot blanc italien a beaucoup de succès au Royaume-Uni, c’est bien pour les vignerons de là-bas. Il faut dire que l’Italie nous dépasse maintenant au plan mondial et nous, les Français, nous n’avons pas de plat mondial comme la pizza qui tire si bien le vin italien que c’en est à pleurer pour notre beefsteak frites qui ne nous emmène nul part, vu qu’on mange de moins en moins de bœuf et que les frites, on les prend avec des moules. Comme les Belges, purée, ça démoralise.

 

M3, je suis à la peine avec les cavistes bretons mais comme je ne vends pas là-bas, ça ne changera pas grand chose pour moi. 

 

= A voir rapidement cette séquence, elle me semble moins porteuse que l’international dans ce premier temps. 

 

3. La sélection

. Je garde en tête que le vrac n’est pas à rejeter en vins de pays en rouge surtout et aussi à une moindre échelle en blanc.

. Le BIB aussi, je prends parce que « qu’est-ce que le BIB ? », je vous le demande, si ce n’est un petit vrac. 

. Je n’ai pas intérêt à augmenter mes prix surtout des vins de pays, je vais me focaliser sur les vins de cépages.

. Le blanc et le rosé attirent surtout quand ils sont légers et moi aussi donc, je suis séduit par « ces vins de plaisir, craquants » comme il est écrit. L’attrait pour le rouge faiblit un peu.   

. L’info avec les cavistes m’intéresse quand même. Il ne faut jamais négliger les touristes étrangers surtout dans les zones non viticoles.

 

= Une opération difficile pour ne pas trop rêver mais indispensable pour la suite.  

 

4. La remise en ordre

Je constate aussi que j’ai des manques. A ne penser que marché anglais ou américain, peut être faut-il aussi regarder les marchés nordiques mais pas forcément sous monopole d’Etat.

J’ai aussi un problème de volume comme beaucoup de mes collègues. Ma production est très variable d’une année sur l’autre. Et puis, je ne m’y connais pas beaucoup à l’export.

 

= Cette remise en ordre consiste en un rapprochement entre ce je lis et ma situation. C’est souvent un peu douloureux, il ne faut pas se le cacher.

 

5. Ma stratégie

Jouer le vrac n’est possible qu’avec des volumes importants susceptibles d’intéresser un importateur distributeur. De toutes les façons, ce serait quand même un retour en arrière. Le Prof JD me prévient de ne pas trop se fier aux statistiques de certains pays européens et d’un réseau de vente invisible. Il table même un léger déficit sur le marché européen, contrairement aux craintes de surproduction.

Je garde en tête la phase 3 et muni de toutes ces réflexions et d’autres aussi bien sûr, je m’en vais contacter quelques collègues, qui me ressemblent et avec lesquels je vais jouer à jongler avec l’information.

 

6. Le jeu de stratégie

L’idée est de se réunir à quelques-uns, 6 comme ça au hasard. Peut être moins pour commencer, à 3 ce serait déjà bien. Avoir déjà 2 collègues avec lesquels on est en confiance, ça compte dans la vie.

 

La personnalisation de l’assemblage

Il suffit de découper les 6 infos pour ne pas garder l’ordre de Wine Alley qui a déjà mâché le travail grâce à la cohérence de sa présentation. Il y a donc 6 petits tas dans lesquels chacun prélève un petit billet pliés en 4. Ce n’est toujours qu’un exemple. On pourrait en mettre plus pour avoir une situation plus proche de la réalité. Le vrac n’est pas forcément un bon exemple pour tous les vignobles de France.


La recherche des informations manquantes

A chacun ensuite de donner un ordre qui lui semble logique d’après sa propre situation qui est forcément différente de celle de ses copains. A chacun surtout aussi de raisonner en terme de manque pour pouvoir avancer.  On peut imaginer quelques séances entre lesquelles chaque joueur trouverait l’information manquante pour constituer un début de stratégie export.      

 

La restitution

Le jeu consiste à s’enrichir de la différence de chacun. Si les 3 répondent en proposant ce que préconise le syndicat ou les institutionnels proches, l’apport ne sera pas forcément concluant, mais pas forcément négatif ou négligeable non plus. Une des conclusions quasi naturelle sera de voir ce qu'on peut faire ensemble, mais ce n'est pas obligatoire.  

L'apport simple
C'est déjà qu'on a réfléchi ensemble et qu'on s'est posé des tas de questions. Il en sort forcément des avancées. On est pas obligé de constituer un groupe export; on peut travailler en synergie en s'entraidant. C'est ce que font beaucoup de vignerons comme nous à Sancerre. Oui, je sais bien, eux, ils exportent plus de 40% de leur CA les petites années! Nous, on débute... 
 


L’apport +

Etre petit vigneron oui mais ensemble avec d’autres, ça permet de se grouper, de mettre des moyens en commun, de lisser la production, de surveiller nos prix, de négocier plus facilement avec une carte des vins plus fournie, de développer une vraie stratégie et d’embaucher un responsable export, tout en apprenant l’anglais. Yes, we can indeed.  

L’apport ++

Il s’agit là du degré 2 du groupement export. Ensemble avec en plus une personnalité dont la différence d’avec la concurrence va être perceptible par les importateurs distributeurs et par les consommateurs. Cette différence, c’est l’avantage concurrentiel.  Et là, c’est autre chose. Vous le sentez aussi, j'ai sauté uner marche: je suis maintenant positionné vers le marché. Et le marché commence dans mon chai, à ma porte, que ce soit pour la France,  l'UE ou l'international.   

 

= Et cette fois-ci, foin de pointillisme : pour moi, vigneron du Val de Loire, l’export, c'est aussi pour moi  ! Y a de quoi faire.  

Pour suivre le chemin

. Retrouver la sélection dans Wine Alley, n° 96, 11.08.2009

 sur  www.winealley.com/index_v4.php?mode=avd&art_id=50111&imprimer=oui&…

. Vrac I1, voir Agreste Synthèse Viticulture, juin 2009, n° 74

. Vrac I2, à voir sur www.decanter.com    

. Nouvelle-Zélande, National Bussiness Review, SONZAF

. Jean Dubois, président du Grievit, revue Eurowine sur eurowine@eurowine.fr

. BIB en Suède, à voir sur www.bkwine.com

. Pinot Grigrio, Wine and Spirit Trade Association

. Photos EP

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