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Le Blog d'Elisabeth Poulain

WBW30 > Les Habits des Vins d'Emotion > Le Signe du Trait

27 Juillet 2009, 11:11am

Publié par Elisabeth Poulain

La satisfaction             

Il a déjà beaucoup été question des mots et des blasons qui figurent sur les étiquettes en particulier dans le Signe de Papier. Par différence, le Signe du Trait apporte une autre dimension, celle donnée par la satisfaction provoquée par des signes, mots à forte densité ou chiffres ou par la forme et la façon dont le trait est apposé pour donner du sens. Le Signe du Trait a même préexisté à la bouteille de verre qui est une invention du 18ème siècle en Angleterre. Plus d’un millier d’année avant, des amphores fabriquées en Italie étaient déjà arquées au nom du maître de chai dans l’argile encore fraîche avant d’être livrées en Méditerranée.

 

Dans le monde du vin, la façon de dire est au moins aussi importante que le mot lui-même, comme l’attente d’un cadeau participe de l’importance du cadeau attendu. Il en va de même avec l’habillage du vin qui est une promesse annoncée d’une jouissance proche, comme le paquet cadeau complète le cadeau, tout en ayant sa valeur propre. L’approche sensorielle est tout autant fondée sur l’émotion et la mémoire.  A ces titres, elle fait entièrement partie de la culture contemporaine. Ce sont autant de raisons qui expliquent l’essor du design graphique. Le trait provoque le bouleversement des frontières, entre le dit et le non-dit, le dedans et le dehors, le marqué et le ressenti.

 

L’emblème graphique

Il désigne le logo dont l’usage connaît en français un essor étonnant. Il se définit comme un signe visuel de repérage des produits et/ou des marques, logo signifiant marque en anglais. La différence entre l’usage des initiales à titre de blason et celles qui servent de logo tient en l’existence dans le second cas d’une volonté de communiquer de façon contemporaine, en utilisant les leviers tels que l’émotion, l’annonce d’une promesse, d’un cadeau, d’une satisfaction, la fascination mais aussi l’information ou la confirmation…On peut distinguer plusieurs étapes, la première consiste à choisir une typographie particulière pour son nom, son prénom, la première lettre de l’un ou l’autre, bien souvent suggérée par l’imprimeur, la plus conceptualisée aboutissant à faire une véritable œuvre de création graphique grâce à ce qui est vraiment du design.    

 

Le pouvoir d’émotion d’une lettre

C’est très souvent la première lettre du prénom ou du nom du vigneron, du nom du domaine, ou d’une partie du nom ou de la ville où est situé le domaine ou la coopérative. Le choix se fait selon différents critères : le choix du prénom appartient au monde de l’enfance, celui du nom de la famille relève de la volonté dynastique, le domaine met l’accent sur la volonté de rendre hommage à la terre et/ou à la propriété. Il peut y avoir aussi un choix plus graphique, pour le H, le I, le X, le V par exemple ou un jeu sur la sonorité comme le R de Roc, comme pour Rock.  La distinction à faire avec le SIGNE de Papier porte sur la recherche d’un esthétisme contemporain ici :

 

701. le G de Gouron pour un Chinon du Domaine Gouron avec un effet millésime particulièrement marqué,

702. le G de Gibault du Domaine du même nom répété deux fois, une sur le corps supérieur de l’étiquette et une en plus grand dans le corps central pour Alliance, un Touraine rouge ;

 

703. le J de Juchepie niché au fond de l’œuf que forme le O d’Oosterlinck, les vignerons du domaine, pour ‘le Sec de Juchepie’ ‘Les Monts’ un Anjou blanc sec ; 

 

- le L de Louis de Grenelle pour un Crémant de Loire Platine des Caves Louis de Grenelle de Saumur traité de façon très graphique et de façon décalée sur le muselet ;

 

704. un M très particulier pour Daniel Macault, Domaine des Deux Moulins,  pour un Anjou-Villages Brissac, Le Clos au Chat, puisque la lettre est séparée en deux parties à chaque extrémité de l’étiquette circulaire,

 

705. le M de la Fruitière, un Muscadet de Jean Douillard et Jean-Michel Boussonnière avec un design qui met en valeur le M puisque c’est le nom de ce Muscadet Sèvre et Maine sur lie. Il prend un quart de l’étiquette en lettres droites. C’est le seul cas de sélection de l’initiale du vin ;

 

706. le R de Roc de Châteauvieux, un Pineau d’Aunis de Pierre Chainier ;

 




707. le









L’emblème à deux initiales

Ces initiales reprennent souvent le prénom et le nom d’une personne, les deux prénoms d’un couple ou celles d’une parcelle ou d’un domaine. Ce peut être aussi un jeu sur une des caractéristiques du nom du domaine ou un nom de cuvée :

- BC pour Bruno Cormerais avec un jeu graphique très réussi résultant de l’usage d’un dessin de bois de vigne pour le B et la trace d’un verre pour le C, pour un Muscadet Sèvre et Maine sur lie,

 

- HP pour Henry Pellé avec un design très contemporain, le H est plus grand que le P, le jeu se fait sur les trois verticales en grisé léger sur le tiers gauche de l’étiquette rectangulaire et la barre du H, est constituée par le dessin des porteurs de raisin de très petite dimension et seul élément or, 

 

- JB en forme de tampon qui déforme l’étiquette vers le haut à droite pour un Sancerre Joseph Balland Chapuis, Domaines Saget : le point du I est formé par une feuille de vigne avec une grappe de raisin,

 

- TL pour les Montlouis de Jacky Blot du Domaine de la Taille aux Loups, avec un effet d’ombrage qui double les lettres et en renforce la présence,

 

708. VT à effet mystère certain pour un Touraine Vendanges Tardives 2004 de Barbeillon Rouballay.

 


Le jeu à trois

C’est une façon de parler d’un couple:

- ASF pour Alina et Stéphane Filiatreau de Saint-Germain sur Vienne, sur le rond central d’une bague de cigare, Aroma, pour un Touraine, 

- J.Y.A. Lebreton, pour Jean-Yves et Annick Lebreton,  en forme de signature pour les vins d’appellation du Domaine des Rochelles,

 

La signature

La signature constitue l’étape suivante. Elle marque la démarche suivante comme des bornes sur une parcelle. On signe son vin comme on signe une lettre importante, un engagement et une garantie. Plusieurs modalités sont en usage. Développer son prénom avant de donner son nom donne des indications sur le genre du vigneron dans la majorité des cas, sur l’âge parfois et confère une proximité. La tendance est à mettre son prénom pour personnaliser le vin : 

 










709. Valérie Forgues pour un Touraine La Méchine,

710. Franck Gourdon du Domaine de Piedflond pour tous ses vins d’Anjou,

 

- Philippe Portier, pour un Quincy, Domaine de la Brosse,

- Alphonse Mellot à Sancerre pour tous ses vins.

 

- une signature graphique pour Le Domaine Saget de Pouilly sur Loire avec Saget en jaune dont le S très exubérant s’entrelace avec Domaine. D’autres versions existent pour Guy Saget dont le S jaune relie le Y de Guy au S de Saget en blanc sur fond noir, pour un Pouilly Fumé, Les Logères.

 

En sens inverse  et plus exceptionnellement, certains et certaines se refusent à indiquer leur prénom qui continue à figurer sur les étiquettes uniquement par l’initiale. Les raisons sont plurielles. Citons la volonté de mettre le nom de famille en lumière, de jouer la complémentarité et le passage de relais entre un père et son fils, ou pour une femme, le choix d’être un professionnel comme un autre. L’arrivée d’un gendre au Domaine conduit aussi parfois à supprimer l’initiale du fondateur beau-père pour montrer la prévalence du domaine sur la personne.

 

Une des conséquences de la tendance  à indiquer les noms des personnes qui incarnent le domaine est la suppression ou le non-usage du mot domaine.

 

- L’abandon de la référence au domaine a conduit Jane et Pierre Aguilas à modifier l’étiquette désormais haute et fine et à placer leur nom en haut dans un panonceau qui annonce leurs vins, Coteaux du Layon-Saint Lambert du Lattay,

 

711. Laurent Chatenay signe ‘La Vallée’ un Montlouis, en or à chaud sur un losange pointé sur ‘La Vallée’ pour mettre le nom de l’appellation en valeur ; Montlouis sur Loire est écrit en grand en bas de l’étiquette dans une étiquette à la construction équilibrée par le soulignage de l’appellation par un socle qui structure l’ensemble.

 

La signature à effet graphique

Plutôt que des initiales qui n’ont souvent de sens que pour ceux qui les portent, le choix se porte sur des emblèmes graphiques figuratifs pour dire autrement qu’avec des mots. La communication non verbale est d’autant plus importante que l’on change d’univers culturel et de langue. Les signes identifiants sont hétérogènes par définition puisqu’ils sont créés pour l’occasion. Le repère peut aussi être une signature conçue cette fois-ci comme du design graphique :

 

- DAGUENEAU de chez Didier DAGUENEAU, vigneron à Saint-Andelain France. C’est ce qu’indique Didier Dagueneau sur tous ses vins la mention Le vigneron est inséparable de cette identité précisée par l’ensemble de ces mots placés dans cet ordre et ceci afin de se distinguer d’autres Dagueneau proches géographiquement mais pas forcément des idées de Didier.

- Sébastien David, vigneron de Saint-Nicolas de Bourgueil qui marque sa volonté de mettre en lumière son métier. 

 

Pour suivre le chemin

. Le prochain billet WBW31 abordera le dessin graphique dans ce 7è chapitre consacré au SIGNE du Trait.

. Les étiquettes de ce Signe sont regroupées en 7WBW Labels.

. Outre ce SIGNE du Trait, il ne reste plus que deux chapitres à découvrir, le SIGNE du JE-U (qui terminera le Cycle contemporain des Vins d’Emotion) et le SIGNE du FEU (qui ouvrira  le CYCLE fondamental des Vins d’Expression).   V du Clos de La Victoire de Jean-Michel Sorbe, pour un Quincy.
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